Nous sommes tous dans l’attente du prochain discours de notre Président de la République. Il a déclaré la guerre contre le coronarovirus et il faut bien reconnaître que sa position est extrêmement difficile car il hérite d’un système qui a accumulé les erreurs depuis très longtemps, avec une très mauvaise éducation de la population dans les principes de base de l’hygiène et de la prévention.
Quant on part en guerre il vaut mieux avoir les armes pour la faire et accepter à l’avance d’avoir des dégâts immédiats et collatéraux aussi bien sur le plan humain qu’économique. Il y a toujours des morts en temps de guerre sauf dans les jeux informatiques.
Le retour du Charles de Gaulle, notre porte-avions fétiche, parce qu’il y a une cinquantaine de COVID positifs, est tout à fait exemplaire de notre situation. Heureusement que nous ne sommes pas en guerre !
Le choix des gouvernements occidentaux a été fortement influencé par l’exemple chinois qui a fait du confinement une arme absolue sans informer correctement le reste du Monde de la gravité du COVID-19, après avoir pris du retard en laissant partir des milliers de voyageurs dans toutes les directions vers les autres continents.
Comme je l’ai déjà écrit on peut se demander si l’âge moyen des grands dirigeants de ce monde n’a pas influencé leur choix stratégique car il était très clair que la population âgée était la plus en danger, alors que les malades ne représentent que 5% des contaminés.
L’objectif choisi a été de sauver le maximum de vies car c’était la seule solution efficace dans l’immédiat pour ralentir la contamination alors que notre dotation en lits hospitaliers de soins intensifs et de réanimation étaient insuffisante, avec une pénurie de moyens de protection, de respirateurs et même de médicaments, pénurie qui a malheureusement était sous-estimée puis cachée par notre gouvernement.
Sa responsabilité est à l’évidence engagée d’autant qu’il est en place depuis presque deux ans, et que les responsables de la Santé sont presque tous les mêmes depuis beaucoup plus longtemps.
C’est un choix qui aura tout de même des conséquences incalculables aussi bien sur le plan humain qu’économique. Cependant au final il faudra tout de même faire la comparaison avec les victimes de la grippe saisonnière, des accidents de la route, des conséquences de l’alcool, du tabac, de la drogue qui n’ont jamais fait l’objet de mesures d’une telle ampleur, malgré l’hécatombe qui touche toutes les catégories de la population
L’investissement humain des soignants et de tous ceux qui nous permis de continuer à vivre a été tout simplement extraordinaire.
La montée en charge a été considérable grâce à l’investissement exceptionnel des moyens hospitaliers publics. Le nombre de lits hospitaliers spécialisés a été considérablement augmenté mais il reste encore moindre qu’en Allemagne par exemple.
Cependant il est tout à fait regrettable que les moyens considérables des cliniques privées aient été utilisés avec retard, et trop souvent presque pas, alors que les réanimations hospitalières étaient submergées, tout simplement à cause de l’incompétence des ARS.
Il est encore plus regrettable que les médecins généralistes aient été court-circuités en leur recommandant de soigner leurs malades à distance avec du Doliprane, ce qui a entraîné forcément un retard au traitement, alors que les antibiotiques et les anticoagulants auraient pu éviter bien des complications et des passages en réanimation.
En tout cas l’augmentation du nombre de malades hospitalisés graves s’est arrêté et il faut espérer que ce plateau se transforme en une courbe descendante.
Il est urgent de sortir du confinement et il faut prendre garde à ne pas céder aux sirènes totalitaires. Il ne faudrait pas recommencer les erreurs et les retards qui ont précédé le confinement. Je n’ai pas changé d’opinion à ce sujet.
Il est essentiel que l’outil industriel et pharmaceutique continue son effort pour équiper les lits de soins intensifs de respirateurs et pour fournir les tests sérologiques, espérer un traitement médicamenteux, et demain un vaccin, en espérant que nous puissions récupérer notre indépendance de production à long terme, ce qui supposera une véritable volonté politique de soutien.
Les personnes qui sont déjà au contact des malades et qui travaillent pour faire tourner le pays devraient être testées dans l’urgence, dès aujourd’hui, en tout cas dès que possible, en espérant que le taux d’immunisation soit très important pour leur permettre de continuer à œuvrer dans l’intérêt de tous.
Dans un délai maximum de 10 à 15 jours, c’est toute la population qui devrait être libérée en testant au fur et à mesure les personnes symptomatiques, et en traitant à la demande.
Si la capacité hospitalière est suffisante, ce qui devrait être le cas en continuant la montée en charge des moyens d’hospitalisation en faisant mieux participer les cliniques privées, notamment en respirateurs et en médicament, il ne devrait pas y avoir plus de victimes que si le confinement est prolongé.
J’ai le plus profond respect pour Didier Sicard que je viens d’entendre sur LCI. J’ai particulièrement apprécié de travailler avec lui il y a une trentaine d’années mais je suis complètement opposé à la suppression des libertés individuelles, même si elles sont transitoires, car le transitoire peut devenir permanent ou revenir insidieusement à d’autres occasions. Les certificats de circulation, les bracelets ou tout autre signe de reconnaissance ne sont pas des solutions dignes et responsables. Profitez de votre confinement pour voir les films hollywoodiens comme « Contagion ». La fin donne froid dans le dos !
Par contre je suis tout à fait d’accord avec lui pour les tests, encore les tests.
Il est évident qu’il ne faudra pas oublier les règles d’hygiène de base et les possibilités de la vaccination car j’espère que les français se vaccineront demain aussi bien contre la grippe saisonnière que contre le coronarovirus.
Par ailleurs il faudra absolument revoir notre système de décision politique avec un Ministre de la Santé qui soit à la fois compétent et responsable, surtout responsable, c’est-à-dire qui ne soit pas en même temps responsable des Affaires sociales notamment des retraites; une suppression des doublons dans toute l’administration, notamment au niveau des ARS, avec un changement de leur mode de direction, c’est-à-dire une indépendance vis à vis de l’État, et une reconnaissance des soignants dans les organismes de décision en particulier dans les hôpitaux.
Cela devrait être appliqué à tous les rouages de notre société sinon cette crise sanitaire et économique du COVID-19 ne servira à rien, sinon à préparer les systèmes totalitaires qui sont à l’affût.
Je ne suis pas un « yakafocon ». Je suis un médecin qui a réfléchi depuis longtemps au fonctionnement de notre société en particulier de notre système de soins. J’ai fait des propositions depuis longtemps et nous ne serions certainement pas dans cette situation si j’avais été écouté. Je suis prêt à les défendre et même à les appliquer si j’en ai l’occasion.
Olivier Badelon
12 avril 2020

10 avril 2020 
Pas encore de commentaire... Lancez-vous!