Olivier BERHEIM – Avocat au Barreau de Paris
D’enseigner, mourir ! Samuel PATY ignorait risquer sa vie en enseignant. Et cela ne fait pas partie des risques du métier. Cela ne doit évidemment pas en faire partie.
Mais quel symbole de voir le savoir et l’ouverture assassinés par l’ignorance, l’intolérance, la haine et le totalitarisme mêlés.
Le sacrifice immonde de cet enseignant sur l’autel de la liberté d’expression a donné un visage à la laïcité, et a réveillé nos consciences.
Il a payé de sa vie, sans l’avoir décidé, notre lâcheté collective depuis 20, 30 ou 50 ans, à force de laisser le corps enseignant en pâture aux parents contestataires permanents du rôle et des décisions des professeurs. L’époque où les instituteurs, « hussards noirs de la République » , parlaient d’or a cédé la place à la dévaluation systématique de l’enseignant, à la dévalorisation de sa fonction, à son exposition en première ligne de la disparition de l’autorité, y compris par sa propre « hiérarchie », pétrie de la culture administrative étouffante du « pas de vague » qui, par négationnisme politique, annihile toute difficulté, puisque le problème n’existe pas !
Insensiblement, la République a courageusement abandonné ses enseignants, mal payés, mal considérés, comme aussi elle a largué les pompiers attaqués dans les cités, les policiers canardés par les petits caïds de banlieue, ou le personnel hospitalier attaqué, lorsqu’il n’est pas surchargé. Car tout se tient.
Et ce n’est pas qu’un problème de rémunération. La considération et le respect, de la loi comme d’autrui, ont fondu mieux que neige au soleil.
Ce long dérapage incontrôlé que, dans le déni presque militant, l’on a insisté à ne pas voir, a croisé la montée progressive de l’islamisme, lui aussi objet du même déni, avec cette nuance que, s’il ne se confond pas avec l’islam, l’islam politique, difficilement détachable, en reste fort proche, et que la porosité entre les deux n’est malheureusement pas totalement imaginaire.
Les attentats de CONFLANS Ste HONORINE et de NICE ont provoqué une saine réaction, visible, des musulmans modérés de FRANCE, que l’on n’avait que trop peu entendus jusqu’ici.
Le complexe démocratique est lourd à porter, qui a conduit à se taire devant l’accusation si vite et haut brandie de stigmatisation dès la première remarque critique de l’islamisme, comme aussi bien de l’islam, longtemps amalgamés par les musulmans au point d’aboutissement que sont le silence et l’inaction imposés par cette autocensure soumissionnaire.
Ne rien dire, et tout laisser faire au nom d’une tolérance mal intégrée revient à nier la démocratie, et l’expose aux pires dangers.
Ainsi, le champ libre a été offert à une dictature insidieusement politisée de l’islam : faire de tout propos qui n’aille pas dans le sens du respect de ses préceptes devient immédiatement suspect, voire condamnable comme s’il s’agissait d’un blasphème. S’installe donc, obligée ou autosubie, la tyrannie de l’acceptation imposée par certains, dont la religion, et le système politique qui en découle, ou qu’ils voudraient en faire découler, ignorent définitivement la discussion ou la contestation, et les ont rejetées en bloc. L’on en arrive à ce paradoxe merveilleux: par le jeu bien maîtrisé de nos principes, musulmans et islamistes nous imposent de nous soumettre à leurs règles.
Au nom d’une laïcité mal comprise et complexée, l’on a baissé pavillon devant l’islam.
A force, individualisme forcené aidant, de vouloir mettre de la liberté et de la démocratie prétendument partout, dans l’enseignement, l’entreprise, la famille, l’on risque de finir par n’en avoir plus nulle part. Et c’est insensiblement ce qui s’est produit. La laïcité, telle qu’elle a été conçue en France, n’avait pas à se mettre en berne devant les exigences d’une religion. Comment n’avons-nous pas vu, par exemple, qu’admettre des interruptions pour permettre de faire des prières pendant le travail, ou pour occuper l’espace public, constituait, au prétexte d’un respect devenu supérieur de la liberté religieuse, un renoncement lamentable à la laïcité, et menait à une dictature douce de l’islam politisé par son envahissement dans la sphère professionnelle ou publique de ce qui doit relever de l’intime, et y rester cantonné ?
Ainsi a-t-on laissé se développer des écoles coraniques, plus ou moins clandestines, sans aucun contrôle, ni sanitaire, ni autre, dans lesquelles la haine et le dogme sont instillés dès le plus jeune âge, causant des dégâts profonds. Ainsi a-t-on admis les prières de rue, ou organisé des salles de prière sur des lieux de travail.
Progressivement, par une tolérance excessive à l’intolérance, par lâcheté, opportunisme, inconscience et inconsistance mêlées, des zones de non droit se sont développées sur des nationalismes de quartiers.
Comment imaginer que pour une majorité de jeunes musulmans récemment interrogés, fin septembre 2020, par sondage les règles de la charia soient considérées supérieures à la loi de la République ?
En croyant acheter la paix civile par laisser faire, l’on a permis le développement de dictatures locales qui, fortes de leurs succès, encouragées par leur expansion, tendent à s’étendre face au ventre mou offert. Le schéma est bien classique, que Winston CHURCHILL, visionnaire, avait prophétisé en 1938, après MUNICH, dans une formule terrible : le déshonneur suit la lâche démission. « Vous aurez la guerre et le déshonneur ».
Le ciment français de laïcité et de liberté, qui prenait progressivement par l’addition de l’adhésion citoyenne, d’une école efficace, de l’histoire intégrée, éventuellement du service militaire, s’est peu à peu délité.
Le contrôle des mosquées, où les prêches haineux proférés parfois par des fonctionnaires contrôlés par l’étranger ne sont pas acceptables, n’est que la partie immergée de l’iceberg : une bien plus grave partie du problème vient d’Internet, où la diffusion plus virulente de propos et images saoule une jeunesse trop réceptive, si peu critique, de concepts et idées incontrôlés contenant des messages, ouverts ou subliminaux, de guerre sainte à mener, jusqu’à de quasi-tutoriels de décapitation. L’isolement, compagnon paradoxal d’Internet, permet les autosuggestions et radicalisations discrètes d’un lumpenprolétariat inculte, prompt à se révolter et passer à l ’acte, qui exige le respect qu’il refuse à autrui, sert de terreau fertile à la déviance libre, au bout de laquelle les plus faibles se vautrent dans le terrorisme de quartier avant de devenir islamique.
Espérons que l’émotion suscitée par les assassinats aveugles, qui ne s’interrompront pas, nous réveille du lourd sommeil de la tolérance et de l’aveuglement qui nous a assommés depuis 30 ou 40 ans : l’islamisme, maladie transmissible de l’islam, n’est qu’un totalitarisme. Il en a les principes, il a su en moderniser les méthodes.
Les images récentes de drapeaux français ou portraits d’Emmanuel MACRON brûlés en places publiques par des foules d’excités haineux reproduisent, à l’identique, celles vues en Allemagne nazie entre 1933 et 1939, hystérie en moins, brûlant des livres interdits ou des objets juifs. Il n’y a en fait entre ces gens aucune différence, sinon désormais l’atomisation de l’armée totalitaire, devenue constituée de solitaires disséminés et sans uniformes.
Nous renforcer dans nos principes et valeurs est plus nécessaire que jamais, sans que nous ne changions un iota à nos comportements : ce serait déjà une victoire pour les ennemis de la liberté. Nous devons une fermeté sans faille aux victimes des barbares, ne serait-ce que par respect pour leur sacrifice involontaire.
Mais cela ne suffira pas : malheureusement, le totalitarisme ne se combat pas avec de bons sentiments.
Olivier BERNHEIM
31 octobre 2020
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